Charte des droits de la défense
A l'ouverture du 37ème Congrès de la FNUJA à Perpignan, Candide demandait: "Pourquoi donc une Charte des droits de la Défense au pays des droits de l'homme ? Regardez ce qui se passe hors de vos frontières !"
Souhaitons qu'à l'issue de nos travaux, il ait compris d'une part que la France n'est plus à la hauteur de sa réputation, d'autre part qu'une telle réputation nous crée des responsabilités
"Observez que, même en France, il n'existe pas telle disposition libérale ou qu'au contraire il existe telle disposition répressive" et qu'enfin le degré de démocratie d'un pays se mesure très exactement à l'importance accordée aux Droits de la Défense.
Curieusement (est-ce le bon adverbe ?) la Constitution ne dit mot des Droits de la Défense. Le Conseil Constitutionnel a cependant pallié cette carence en reconnaissant qu'ils "résultent des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République", c'est-à-dire qu'ils ont désormais valeur constitutionnelle.
Ces droits de la défense ne sont pas, malgré tout, reconnus dans un grand nombre de situations dans lesquelles ils mériteraient cependant de l'être : devant l'Administration (refus d'autorisation), la police (garde à vue), un employeur (licenciement), un propriétaire (expulsion), un parti ou une association (exclusion), etc…
Là où ils existent, ils ont subi un systématique et insidieux grignotage (tentative d'instauration du Juge Unique en matière pénale, régime des nullités de procédures, inégalité entre l'Accusation et la Défense, portiques, fouilles ...).
Il appareil ainsi indispensable de donner un contenu à un principe qui, sans cela, resterait vide de sens.
C'est le difficile travail de recherche et de synthèse auquel se sont livrées les U.J.A. d'Angers et de Paris pour nous présenter les deux grands chapitres de la Charte : le Droit à la Défense et les Droits du Défenseur.
TITRE I : LE DROIT A LA DÉFENSE
Art. 1 : Les droits de la défense sont reconnus à toute personne devant toute juridiction, tout organisme ou toute autorité dont la décision la concernant est susceptible de lui retirer un droit ou une liberté, ou d'en restreindre l'exercice, de lui accorder ou de lui refuser, soit un avantage dont elle demande l'attribution, soit un droit qui lui est contesté ou dont elle sollicite la reconnaissance, de lui infliger une sanction.
Art. 2 : Nul ne peut être privé de ces droits ni contraint à y renoncer.
Art. 3 : L'exercice des droits de la défense peut toujours être confié à un avocat inscrit à un Barreau.
La loi détermine les cas dans lesquels le ministre d'avocat est obligatoire, l'assistance ou la représentation d'autrui peut être assurée par une personne autre qu'un avocat.
Art. 4 : Chacun est libre du choix de son défenseur. Toute disposition qui aurait pour objet ou pour effet direct ou indirect de déroger à ce principe est réputée non écrite.
Art. 5 : L'Aide Légale garantit à ceux dont les ressources sont insuffisantes, le concours d'un Avocat.
Art. 6 : Aucune des décisions visées à l'Article A ne peut intervenir sans que soient respectées les dispositions des Articles 7 à 11, ci-après.
Art. 7 : L'intéressé a droit à une convocation préalable écrite et portée à sa connaissance dans une langue qu'il comprend contenant les motifs et l'objet de la procédure, la faculté et les modalités de l'assistance ou de la représentation, les sanctions éventuellement encourues, la date et le lieu et l'auteur de la décision susceptible d'être prise.
Art. 8 : Il doit disposer du temps nécessaire à la préparation de sa défense et pouvoir communiquer librement et effectivement avec son défenseur.
Art. 9 : Il dispose, d'une manière générale, des mêmes droits que la partie qui a pris l'initiative de la procédure. Il peut prendre connaissance de tous les éléments soumis aux débats et se faire délivrer copie des pièces du dossier.
Art. 10 : Il a droit à ce que sa cause soit entendue au cours de débats publics.
Le huis-clos ne peut être prononcé à sa demande ou à celle d'une autre partie à la cause que, Si la publicité des débats risque de compromettre la moralité publique, la sécurité nationale, la protection de la vie privée ou professionnelle des parties à la cause, où l'intérêt des mineurs.
Art. 11 : Il a la faculté de solliciter toute mesure d'instruction utile à sa cause, d'interroger toute personne dont l'audition a été ordonnée, et de voir consigner les réponses apportées.
Art. 12 : La décision prise doit être écrite, motivée en droit comme en fait et fondée sur les seuls éléments soumis au débat contradictoire et prononcées publiquement.
Art. 13 : Elle doit être notifiée dans une langue comprise par l'intéressé.
La notification précise les voies de recours ouvertes contre la décision, les délais et les modalités des recours.
Art. 14 : Les délais et l'exercice des recours sont suspensifs d'exécution sauf dans les cas où la Loi en dispose autrement.
Art. 15 : Les dispositions des articles 1 à 14 sont d'ordre public doivent être observées à peine de nullité.
TITRE Il - LES DROITS DU DÉFENSEUR
Art. 16 : Est un défenseur, au sens de la présente Loi, quiconque exerce une mission de défense à titre occasionnel ou permanent, qu'il bénéficie ou non d'un statut professionnel inhérent à cette mission.
Art. 17 : Tout défenseur s'oblige à agir en pleine indépendance, avec dignité, loyauté et humanité.
Art. 18 : Tout défenseur est libre d'accepter ou de refuser une cause sans que ce choix soit susceptible d'entraîner à son détriment quelque action que ce soit. Il ne peut être contraint d'exercer ou de poursuivre sa mission contrairement à sa conscience.
Art. 19 : Le défenseur doit être mis en mesure d'accomplir sa mission avec conscience et efficacité, dans le respect des articles 7 à 1 1 de la présente Loi et rester seul maître de la forme et de la durée de son argumentation.
Art. 20 : Conduit dans l'exercice de sa mission par le seul souci des intérêts de la personne qu'il défend, il s'oblige, quelle que Soit la source de la rémunération, à conserver une totale liberté.
Art. 21 : Tout défenseur est dégagé dans l'accomplissement de sa mission de tout lien de subordination ou de soumission.
Art. 22 : Le secret qui s'impose à un défenseur est absolu. Toutefois, il peut en être délié à la requête expresse de la personne qu il défend, Soit encore lorsque cette dernière est empêchée de s'exprimer Si l'intérêt de sa défense l'exige.
Art. 23 : Le secret, tel que défini ci-dessus, s'étend à toutes les correspondances, conversations, objets de toute nature, et notamment à tous les documents, enregistrements, photographies, films en rapport avec la mission du défenseur.
Art. 24 : Nulle écoute, perquisition, fouille ou saisie, qui aurait pour but ou pour effet direct ou indirect aux dispositions des articles 22 et 23 de la présente Loi ne peut être effectuée.
Art. 25 Nul défenseur ne peut être poursuivi, recherché ou inquiété en raison des déclarations effectuées, des discours prononcés ou des écrits produits dans l'exercice de sa mission remplie conformément à la présente Loi.