Où sommes-nous ? Centre de loisirs, lieu de placement, école bien gardée ?
Non, dans un EPM, et plus particulièrement, à l’EPM de MEYZIEU (69), l’un des trois premiers établissements pénitentiaires pour mineurs (et « EPM-pilote » en Europe) inauguré en grande pompe par Madame le Garde des Sceaux en JUIN 2007.
Une super-prison pour mineurs, donc, censée remplacer « avantageusement » les quartiers pour mineurs des centres pénitentiaires pour adultes (7 EPM prévus entre 2007 et 2009, avec 400 places).
Un établissement divisé en « unités de vie » (arrivants – régime normal – régime « de confiance » – UPCEI, prise en charge éducative intensive), avec en principe 36 éducateurs pour un maximum de 60 mineurs.
Tout ceci pouvait paraître, à première vue, positif : une prison consacrée aux mineurs, avec pour axe principal « l’éducatif »…
Seulement voilà, les premiers incidents survenus dès JUIN 2007 mettaient en évidence un certain nombre de dysfonctionnements.
Pour exemple, la structure même de l’établissement était sujette à caution en raison de ses murs démontables, de l’inadéquation des matériaux utilisés, et de l’architecture même de l’établissement selon certains personnels…
En effet, il est aberrant d’apprendre qu’avant même son ouverture, aucun personnel, qu’il s’agisse des services pénitentiaires ou éducatifs n’était venu s’assurer de l’adéquation du projet avec la réalité…
Plus alarmant, au-delà des dysfonctionnements matériels, il est à déplorer les graves dysfonctionnements liés au manque de moyens humains affectés à ces EPM : pas assez d’éducateurs, personnel mal ou peu formé…
Les mineurs eux-mêmes le disent : ils préféraient encore les quartiers pour mineurs dans les prisons pour majeurs, aussi sordides soient elles d’ailleurs (cf. St Paul-St Joseph à LYON), car là bas, pas d’ambiguïté.
Ils ne savent pas où ils sont : une école, un centre éducatif renforcé ou fermé, avec des règles applicables au milieu carcéral classique. Ceci génère une augmentation préoccupante du nombre de procédures disciplinaires pour des faits qui, en quartier mineurs classique, ne font pas toujours l’objet de poursuites.
S’ensuivent des sanctions parfois très lourdes qui ne dissuadent pas les mineurs, bien au contraire.
Alors c’est l’escalade…
Cette confusion des genres provoque anxiété chez ces mineurs complètement déphasés et les conséquences peuvent conduire au pire.
Selon le côté d’où l’on se place, c’est une illustration dramatique de ces dysfonctionnements pour certains ou malheureux concours de circonstances pour d’autres. Toujours est-il que le premier suicide de mineurs en France depuis 2004 s’est produit le 4 FEVRIER 2008 à l’EPM de MEYZIEU.
La CNDS (commission nationale de déontologie de la sécurité), saisie après les faits, a rendu un rapport alarmant le 17 NOVEMBRE 2008.
La CNDS relève de nombreux dysfonctionnements (problèmes de conception et de fonctionnement : installation électrique des cellules permettant facilement de démonter les plafonniers et donc de provoquer un incendie…) et formule plusieurs recommandations (mise en place d’une cellule d’information et de coordination réunissant tous les intervenants devant la réitération d’actes d’auto-agression de la part d’un mineur détenu, …).
On retiendra surtout l’indignation de la CNDS, suite à « une note d’information remise au mineur placé à l’UCPEI : ’’Durant le temps 1, vous êtes fortement incité à travailler autour de la question du suicide’’, cette note, remise à un jeune de 16 ans qui a déjà fait quatre tentatives de suicide, est une faute que le bon sens et un peu d’humanité auraient dû permettre d’éviter… ». De même, le médecin à qui on demande un certificat médical de compatibilité avec un placement au quartier disciplinaire n’a pas connaissance du dossier médical du détenu…
Souhaitons que l’Administration Pénitentiaire, avant même que des instructions lui soient données, entende ces critiques et n’oublie jamais ces fondamentaux que sont le bon sens et l’humanité…
A l’instar des propos de Mme GENEVOIS, (seule) psychologue à l’EPM de MEYZIEU qui, rappelant les conditions nécessaires à l’évolution du mineur lors de son incarcération, insiste sur le fait « que l’adolescent soit respecté à tout moment dans sa dignité d’être humain, qu’il soit considéré par l’ensemble de l’environnement carcéral comme un sujet apte à opérer ses propres choix et à les assumer (…) ».
Hélène Renaudin
Ancienne présidente de l'UJA de Lyon
Avocate au Barreau de Lyon
Non, dans un EPM, et plus particulièrement, à l’EPM de MEYZIEU (69), l’un des trois premiers établissements pénitentiaires pour mineurs (et « EPM-pilote » en Europe) inauguré en grande pompe par Madame le Garde des Sceaux en JUIN 2007.
Une super-prison pour mineurs, donc, censée remplacer « avantageusement » les quartiers pour mineurs des centres pénitentiaires pour adultes (7 EPM prévus entre 2007 et 2009, avec 400 places).
Un établissement divisé en « unités de vie » (arrivants – régime normal – régime « de confiance » – UPCEI, prise en charge éducative intensive), avec en principe 36 éducateurs pour un maximum de 60 mineurs.
Tout ceci pouvait paraître, à première vue, positif : une prison consacrée aux mineurs, avec pour axe principal « l’éducatif »…
Seulement voilà, les premiers incidents survenus dès JUIN 2007 mettaient en évidence un certain nombre de dysfonctionnements.
Pour exemple, la structure même de l’établissement était sujette à caution en raison de ses murs démontables, de l’inadéquation des matériaux utilisés, et de l’architecture même de l’établissement selon certains personnels…
En effet, il est aberrant d’apprendre qu’avant même son ouverture, aucun personnel, qu’il s’agisse des services pénitentiaires ou éducatifs n’était venu s’assurer de l’adéquation du projet avec la réalité…
Plus alarmant, au-delà des dysfonctionnements matériels, il est à déplorer les graves dysfonctionnements liés au manque de moyens humains affectés à ces EPM : pas assez d’éducateurs, personnel mal ou peu formé…
Les mineurs eux-mêmes le disent : ils préféraient encore les quartiers pour mineurs dans les prisons pour majeurs, aussi sordides soient elles d’ailleurs (cf. St Paul-St Joseph à LYON), car là bas, pas d’ambiguïté.
Ils ne savent pas où ils sont : une école, un centre éducatif renforcé ou fermé, avec des règles applicables au milieu carcéral classique. Ceci génère une augmentation préoccupante du nombre de procédures disciplinaires pour des faits qui, en quartier mineurs classique, ne font pas toujours l’objet de poursuites.
S’ensuivent des sanctions parfois très lourdes qui ne dissuadent pas les mineurs, bien au contraire.
Alors c’est l’escalade…
Cette confusion des genres provoque anxiété chez ces mineurs complètement déphasés et les conséquences peuvent conduire au pire.
Selon le côté d’où l’on se place, c’est une illustration dramatique de ces dysfonctionnements pour certains ou malheureux concours de circonstances pour d’autres. Toujours est-il que le premier suicide de mineurs en France depuis 2004 s’est produit le 4 FEVRIER 2008 à l’EPM de MEYZIEU.
La CNDS (commission nationale de déontologie de la sécurité), saisie après les faits, a rendu un rapport alarmant le 17 NOVEMBRE 2008.
La CNDS relève de nombreux dysfonctionnements (problèmes de conception et de fonctionnement : installation électrique des cellules permettant facilement de démonter les plafonniers et donc de provoquer un incendie…) et formule plusieurs recommandations (mise en place d’une cellule d’information et de coordination réunissant tous les intervenants devant la réitération d’actes d’auto-agression de la part d’un mineur détenu, …).
On retiendra surtout l’indignation de la CNDS, suite à « une note d’information remise au mineur placé à l’UCPEI : ’’Durant le temps 1, vous êtes fortement incité à travailler autour de la question du suicide’’, cette note, remise à un jeune de 16 ans qui a déjà fait quatre tentatives de suicide, est une faute que le bon sens et un peu d’humanité auraient dû permettre d’éviter… ». De même, le médecin à qui on demande un certificat médical de compatibilité avec un placement au quartier disciplinaire n’a pas connaissance du dossier médical du détenu…
Souhaitons que l’Administration Pénitentiaire, avant même que des instructions lui soient données, entende ces critiques et n’oublie jamais ces fondamentaux que sont le bon sens et l’humanité…
A l’instar des propos de Mme GENEVOIS, (seule) psychologue à l’EPM de MEYZIEU qui, rappelant les conditions nécessaires à l’évolution du mineur lors de son incarcération, insiste sur le fait « que l’adolescent soit respecté à tout moment dans sa dignité d’être humain, qu’il soit considéré par l’ensemble de l’environnement carcéral comme un sujet apte à opérer ses propres choix et à les assumer (…) ».
Hélène Renaudin
Ancienne présidente de l'UJA de Lyon
Avocate au Barreau de Lyon